10 journées dans la vie d’une ville (1/10) : Divine Salamine

10 journées dans la vie d’une ville (1/10) : Divine Salamine

Les Perses la ravagèrent avant que Périclès ne lui redonne sa splendeur. Socrate en parcourut les ruelles. Sylla y restaura l’autorité de Rome par le glaive. Elle fut soumise à la domination ottomane, aux bombardements vénitiens et à l’occupation nazie. Elle demeure, malgré ses tourments, la capitale d’une Grèce éternelle. Afin de mieux comprendre le passé d’Athènes, Bonjour Athènes vous propose une série de 10 articles écrits par Irina de Chikoff pour le Figaro.

480 avant J.-C. : Divine Salamine

Sûr de la supériorité de sa flotte, le roi perse Xerxès se laisse attirer dans le détroit de Salamine. Thémistocle n’a plus qu’à refermer son piège.

Un sourire mauvais flotte sur ses lèvres. Xerxès contemple l’Acropole en flammes. Il vient de venger l’affront fait à Darius, son père, qui avait été battu à Marathon. Les temples sont à terre. Les statues des dieux ont été dépouillées. Le sanctuaire d’Athèna, protectrice de la ville, profané. Xerxès savoure sa vengeance. Elle aurait été plus complète si les Athéniens n’avaient pas abandonné leur cité. Sur les conseils de l’archonte Thémistocle, ils se sont retranchés sur l’île de Salamine.

Tandis que Xerxès se repaît de l’incendie, un homme est venu le prévenir que la flotte des Grecs, commandée par Thémistocle, qui s’est réfugiée devant Salamine, s’apprête à prendre la fuite. L’armanda perse mouille en rade de Phalère. Xerxès, sans se méfier de l’informateur, va ordonner à ses embarcations de faire voile vers les trières de l’adversaire.

On le surnomme Ulysse parce que, tout comme « l’homme aux milles tours », Thémistocle est doté de la mètis, une intelligence rusée. Il a dépêché son esclave vers Xerxès en escomptant que le roi des rois tomberait dans le piège. Thémistocle veut attirer le fils de Darius dans la passe étroite qui sépare Salamine de la côte attique. La flotte perse est composée de lourds navires qui auront du mal à se déployer dans ce chenal. Les trières grecques en profiteront pour les éperonner. Une technique que les Athéniens maîtrisent désormais. Ils ont un autre avantage sur leurs adversaires, ils connaissent bien les lieux, les vents qui soufflent en cette période de l’année, le sens des courants.

Depuis Marathon, où il avait combattu sous les ordres de Miltiade, Thémistocle s’était convaincu que les Perses reviendraient et qu’Athènes ne pourrait remporter une victoire décisive que sur la mer. En 483 avant J.-C., l’archonte est parvenu à convaincre l’Assemblée du peuple de consacrer les revenus des mines d’argent du Laurion à la mise en chantier d’une flotte de guerre.

L’Olympias, réplique d’une trière athénienne construite entre 1985 et 1987. À la période classique, l’équipage de ces galères de combat se composait de 200 personnes.

À l’aube du 29 septembre 480 avant J.-C., Xerxès a fait installer son trône sur les pentes du mont Aigaléos, qui domine le détroit où le combat va se jouer. Il ne veut rien perdre de l’affrontement au cours duquel sa flotte enverra les trières ennemies par le fond. Autour de lui, sa cour babille. Les Grecs entonnent quant à eux le péan « Allez, fils de la Grèce »… Comme l’avait prévu Thémistocle, l’armada perse se désorganise très vite tandis que le vent se lève. Non seulement les embarcations se gênent les unes les autres, mais elles veulent toutes briller devant les yeux du roi et leur hâte ajoute à la confusion. Les trières grecques fondent sur l’adversaire. Sous le roulis, les archers perses déstabilisés ratent leur cible. Soudain, c’est le sauve-qui-peut car l’amiral de la flotte perse, un demi-frère de Xerxès, a été transpercé par un javelot. Sur les pentes du mont Aigaléos, le roi des rois a disparu, abandonnant son trône. Mais les Athéniens ne crient pas encore victoire. Ils ne le feront que lorsqu’ils apprendront que Xerxès fait route vers l’Hellespont.

Thémistocle est au faîte de sa gloire, Il s’attache à restaurer Athènes. Il fait également fortifier la cité et son pont, insistant auprès de l’Ecclésia pour qu’elle consente à ériger les Longs Murs qui protègent la route qui les relie et font d’Athènes et du Pire un seul et unique ensemble fortifié, comme une île.

C’est de là qu’au lendemain de la victoire terrestre des Grecs sur les Perses l’année suivante à Platées, Cimon, le fils de Miltiade, enverra les trières qui sous prétexte de poursuivre la guerre en Asie assureront à Athènes la conquête d’un empire rayonnant dans toute la mer Égée.

Huit ans après Salamine, Eschyle fera revivre la victoire au théâtre de Dionysos sur les pentes de l’Acropole, dans Les Perses. L’auteur a combattu à Salamine. Il en est resté profondément marqué. Avec cette pièce, il délaisse pour la première fois le passé légendaire pour exalter le patriotisme national d’un peuple libre, dont les lois ont été élaborées au fil des siècles par Dracon, Solon le Sage et Clisthène, instaurant un régime inédit : la démocratie. Les Athéniens en sont fiers parce qu’il permet à chacun de s’accomplir en servant sa patrie. À l’occasion des Grandes Dionysies, un tout jeune homme inaugure son entrée dans la vie publique. Issu d’une prestigieuse lignée d’eupatrides, Périclès est le chorée des Perses.

Une série de 10 articles écrits par Irina de Chikoff pour le Figaro Hors Série. Lire la suite : https://boutique.lefigaro.fr/produit/129563-athenes-eternelle


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